Mon problème est avec le début, l'intrigue commence très lentement et il faut attendre cent pages avant que tous les protagonistes soient entrés en scène et je n'ai pas sympathisé avec l'héroïne, c'est un peu comme Marianne, c'est un personnage avec lequel je n'ai pas d'affinité et avec lequel je ne me suis attachée que sur la fin, c'est-à-dire quand elle a mûri, en soi je ne dévoile rien, puisque les héroïnes d'Austen ont toujours un tord dont elles vont se défaire à la fin, c'est le côté initiatique de l'histoire.
L'autre aspect que j'ai mentionné dans un précédent article, c'est qu'on ne peut pas deviner le happy end dès le début, les conjectures qu'on peut former sont que l'héroïne va revenir sur ses projets de célibat et va elle aussi subir les attentions de Cupidon, car c'est toujours comme ça que ça se passe mais aucun objet ne s'offre à nous dans la première partie du texte et donc c'est le moment de doute, l'histoire ne va tout de même pas tourner autour des amours d'Harriet ?
Si j'avais eu des affinités l'héroïne, peut-être que j'aurai plus apprécié le début, donc si vous avez aimé le début, je serais ravie de connaître vos réactions.
Paradoxalement, j'aurai dû m'entendre avec ce personnage, car quand elle dit "I have none of the usual inducements of women to marry. Were I to fall in love, indeed, it would be a different thing ! but I never have been in love ; it is not my way, or my nature ; and I do not think I ever shall." et ensuite décrit les avantages matériels de sa situation et sa liberté, ça rejoint assez mes propres discours sur le célibat mais voilà, la ressemblance s'arrête là, je trouve le personnage égoïste et snob.
Son snobisme est constant, elle est toujours en train de mesurer la distance sociale entre elle et le voisinage, à chercher les offenses qui lui sont faites dans leur manière de s'adresser à elle et de l'autre, on a l'égoïsme. Vous me direz peut-être que je suis dure avec elle, après tout elle prend soin de son père et ça demande beaucoup de sacrifice. Certes, mais en échange, elle reçoit son affectation aveugle, car il est incapable de lui voir le moindre défaut et son propre égoïsme fait qu'elle n'a pas besoin de se trouver un mari et qu'il seconde ses projets d'indépendance. Mais la raison pour laquelle, je la considère comme égoïste c'est à cause de Mrs Weston et d'Harriet : sa gouvernante se marie, du coup elle se retrouve seule et est en manque d'occupation donc elle prend sous son aile une pauvre orpheline, chamboule son existence en lui donnant des idées de grandeur qui ne conviennent pas à sa naissance illégitime, tout ça parce qu'elle a besoin de fuir sa solitude et de se trouver une nouvelle personne pour lui tenir compagnie à son gré. Ma vision du comportement d'Emma rejoint en général les critiques exprimées par Mr Knightley, je trouve que sa relation avec Harriet est malsaine, car ce n'est pas une relation entre égaux.
Le père ne m'a pas plu non plus, c'est l'hypocondriaque qui oblige tout le monde à se plier à ses caprices, qui pense que tout le monde a les mêmes besoins que lui ou plus exactement qui considère que tout le monde devrait mener la même vie que lui. Du coup, j'ai énormément sympathisé avec le frère de Mr Knightley, car c'est la seule personne dans le livre qui ne se plie pas complètement aux caprices du vieillard et qui lui exprime son agacement, et on le comprend. John Knightley est un personnage avec lequel je m'identifie énormément, il veut simplement qu'on lui fiche la paix et pouvoir jouir de la compagnie de ses enfants après une journée de labeur.
Les travers de ces deux personnages sont tout de même amusant, je n'ai pas pu m'identifier à l'héroïne et sympathisé avec ses problèmes mais j'ai pu m'amuser de son snobisme excessif ou des manies du père mais au début, on a un peu peur de se retrouver limité à leur compagnie pendant les 300 prochaines pages... mais après le cercle s'élargit et l'on retrouve le style de Jane Austen qui met au jour les petits travers de la société, parvient à nous transmettre l'impression qui émane des discours de Miss Bates, la vieille fille qui noie ses visiteurs sous des flots de parole, ou la vulgarité de Mrs E. qui me fait énormément pensé à mr Collins car ses références constantes à Maple Grove, la demeure de sa soeur et ses remarques sur à quel point tout y mieux ont le même ridicule que quand Collins ne cesse de tout comparer à la demeure de Lady Catherine. La peinture des personnages secondaires est très savoureuses car on en retrouve tous les petits ridicules et des types qui sont immuables.
Comme je le disais, au début j'ai été sous le charme de Mr Knightley(le fait d'avoir jeté un coup d'oeil sur un article de blog sur Emma quand j'essayais de venir à bout de mon ennui des premières pages n'y est pas étranger) et j'aime énormément sa conduite tout le long de l'histoire, mais je n'en dirai pas plus, à vous de découvrir ce livre maintenant.