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11 mai 2010 2 11 /05 /mai /2010 15:12

one-hundred-years-of-homosexuality-and-other-essays-on-gre.jpegAujourd'hui sera culturel, car je vais une nouvelle fois vous parler d'un ouvrage lu pour mon mémoire : One Hundred Years of Homosexuality and other essays on Greek Love de David M. Halperin. Ce livre existe également en version française, à un prix abordable.Il date de 1990 et fait 230 pages, index, notes et bibliographie compris.


Il s'agit d'un ouvrage sur le concept d'homosexualité et sur la pratique de la pédérastie dans l'Athènes classiques.  Je précise que le terme de pédérastie, ici, n'est que la transcription du terme grec qui signifie "qui aime les enfants" et n'a absolument aucune connotation de perversité, et fait référence au fait que la relation était sensée être entre un homme et un adolescent. Un des problèmes que pose la pédérastie grecque est justement de savoir si l'on peut la qualifier d'homosexualité grecque ou non, vu que le concept d'homosexualité est une création récente et que les pratiques grecques sont différentes de celles qui pour nous définissent l'homosexualité.


Il y a deux parties, contenant chacune trois essais. La première partie s'intéresse à l'aspect théorique du concept d'homosexualité.

 - One hundred years of homosexuality, contrairement à ce que je pensais en lisant le titre de l'ouvrage, ne fait pas référence au cinquième ou quatrième siècle avant notre ère, mais au fait que le concept d'homosexualité a cent ans, le terme ayant introduit dans la langue anglaise en 1892 et ainsi l'article s'attache à la question de savoir si l'homosexualité a toujours existé ou s'il s'agit d'une création de notre époque, et on a également le fait que l'hétérosexualité est une création récente, puisque ce concept n'existe que pas opposition à celui d'homosexualité.

- "Homosexuality" : a cultural Construct (an exchange with Richard Schneider) présente deux tendances opposées dans la théorisation de l'homosexualité, la tendance essentialiste qui considère que l'homosexualité a existé de tous temps, et la tendance constructiviste qui considère que la sexualité est façonné par les époques et les cultures. Halperin appartient à la deuxième tendance, cette discussion lui permet de préciser certaines de ses positions.

- Two Views of Greek Love : Harald Patzer and Michel Foucault, est un essai sur deux approches différentes, celle de Palzer pour qui l'homosexualité grecque est différente de notre concept actuelle et n'est qu'une pratique initiatique, vide de tout contenu érotique, mais est simplement une pratique culturel destinée à préparer le passage à l'âge adulte et celle de Foucault, dans son Histoire de la sexualité.


palaestra.jpgDans la deuxième partie, les essais sont moins théoriques et sont plutôt une étude des pratiques grecques :

- Heroes and their Pals qui est une explication de la relation entre Achille et Patrocle, par la comparaison avec deux autres duo héroïques présents des textes de la même époque, Gilgamesh et Enkidu, issus de l'épopée babylonienne de Gilgamesh, et, David et Jonathan issu du livre de Samuel. L'idée est qu'il s'agit d'amitié hors du commun mais qui n'ont pas de connotations sexuelles.

- The Democratic Body : Prostitutions and Citizenship in classical Athens est, comme son nom l'indique, un article sur la prostitution à Athènes, qui explique pourquoi un citoyen qui s'est prostitué perdait le droit de s'exprimer à l'assemblée et qui montre l'importance qu'avaient les maisons de passe à l'époque.

- Why is Diotima a woman ? est un essai sur le Banquet et surtout sur la raison pour laquelle Platon fait mettre dans la bouche de Diotime, une femme, le grand discours du banquet sur la manière correcte d'avoir une relation pédérastique. Halperin réfléchit sur les raisons narratives mais surtout sur ce que la féminité apporte à sa théorie et sur le fait qu'il s'agit plus d'une fausse féminité, puisque ce n'est qu'une construction de l'imaginaire masculin.


greek_homosexual_couple.jpgDans l'ensemble, j'ai trouvé ce livre intéressant, en particulier l'essai sur Diotime(mon mémoire portant en partie sur le Banquet...), celui sur la prostitution(car une de mes interprétations d'un passage du Phèdre repose sur un rapprochement avec la prostitution) et le premier sur le concept d'homosexualité qui présente une image de la sexualité à Athènes, avec laquelle je ne suis pas forcément d'accord, mais qui offre une perspective très intéressante.


Cependant, si vous cherchez un livre sur l'homosexualité grecque, je vous conseillerais plutôt l'ouvrage de K.J.Dover, qui est l'ouvrage de référence dans le domaine et qui a eu un énorme impact dans le domaine des recherches sur la sexualité grecque. C'est un livre qui est très axé sur la description des pratiques.

L'ouvrage d'Halperin est plus un point sur l'état des recherches sur la question, et, bien qu'il soit très clair, je ne suis pas sûr qu'il soit d'un grand intérêt pour quelqu'un qui n'a pas déjà des connaissances dans ce domaine. C'est un livre qui s'adresse à un lecteur qui a déjà quelques notions dans le domaine de la pensée de la sexualité soit sur la société grecque. C'est également un ouvrage qui n'est centré que sur Athènes, il n'y est absolument pas fait mention de Spartes, et les pratiques Crêtoises ne sont mentionnées que dans le cadre de l'explication de la position de Patzer.


Ce livre aura eu aussi quelques conséquences terribles sur mon budget, vu que cela m'a fait découvrir quelques livres aux titres très prometteurs pour la bibliographie de mon mémoire. Mon seul regret est que j'ai découvert l'existence de Patzer, or Patzer est un allemand, dont l'oeuvre n'a pas été traduite en anglais, donc que je ne peux pas lire, ce qui est fort dommage car il aurait été très bien dans ma bibliographie(c'est dans ces moments-là que je regrette le temps merveilleux où le latin était la langue des ouvrages scientifiques, car mon latin a beau être pourri... c'est toujours mieux que rien.).


Pour conclure, One Hundred Years of homosexuality est un livre très intéressant, écrit dans un style agréable avec de temps à autres une pointe d'humour.


"I have already argued in the title essay of this collection that sex, as it is represented in classical Athenian documents, is a deeply polarizing experience : constructed according to a model of penetration that interprets "penetration" as an intrinsically unidirectional act, sex divides its participants into asymmetrical and, ultimately, into hierarchical positions, defining one partner as "active" and "dominant", the other partner as "passive" and "submissive". Sexual roles, moreover, are isomorphic with status and gender roles; "masculinity" is an aggregate combining the congruent functions of penetration, activity, dominance, and social precedence, whereas "feminity", signifies penetrability, passivity, submission and social subordination."


"The positive pleasure women take in passivity contributed to justifying, in masculine eyes, their socially as well as sexually subordinate position in Athenian society, for their enjoyment of the passive role signified to Greek men that women are naturally constitued in such a way that they actually desire to lose the... battle of the sexes."
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24 avril 2010 6 24 /04 /avril /2010 16:55

SDC13401.JPGAujourd'hui nous allons parler du banquet et de l'apologie de Socrate de Xénophon. Il faut savoir, tout d'abord, que je n'aime pas particulièrement Xénophon, car Xénophon a un style lourd, avec des répétitions, et c'est l'équivalent des petites roues pour les hellénistes, puisque c'est l'auteur que l'on traduit en abondance quand on est débutant. Mais alors pourquoi, tout d'un coup me suis-je mise à la lecture de Xénophon ? Pour mon mémoire, évidemment, car Xénophon, c'est l'autre source sur Socrate et il présente un Socrate différent de Platon, certains passages sont aussi mentionnés dans mes textes et anthologies relatives à l'homosexualité grecque.


Le premier texte est celui du Banquet, qui fait certainement écho à celui écrit par Platon.

Socrate, accompagné de Critobule, Hermogène, Antisthène et Charmide, est invité par Callias à un banquet que celui-ci donne en l'honneur du jeune Autolycos, qui vient d'être victorieux au pancrace. Xénophon nous raconte comme se déroule un banquet traditionnel entre gens bien éduqués et surtout comment son maître savait se comporter dans les Banquets.

Il y a neuf chapitres, le premier est la mise en place des personnages et l'arrivée du bouffon Philippe, le second rapporte le divertissement donné par un Syracusain et sa troupe, avec les discussions des convives sur ce qu'ils voient, le chapitre III est une discussion où chaque convive énonce ce qu'il juge être sa fierté tandis que le quatrième rapporte les éloges des qualités que chacun vient de mettre en avant. Dans le chapitre V, Socrate essaie de démontrer qu'il est plus beau que Critobule, dans le sixième on discute de ce qui constitue l'attitude inconvenante d'un convive, dans le septième, Socrate demande aux Syracusains de leur préparer une pantomime, dans le huitième, on parle d'Eros et le dernier chapitre raconte comment la soirée s'est finie.


SDC13400.JPGLes plaisanteries ne volent pas toujours très haut, le texte lui-même est très terne en comparaison à Platon. Mon intérêt sur ce texte se résume à quelques passages relatifs à la pédérastie, dont le moment où Charmide explique pourquoi il considère que sa beauté est un vecteur de vertu, mais surtout le moment où Socrate explique pourquoi il considère que sa fierté est dans le fait d'être un entremetteur. Ce qui me fascine le plus dans ce "Socrate entremetteur", c'est le terme grec employé, qui signifie d'après Bailly, celui qui excite à la débauche et qui d'après ce que dit le Socrate de Xénophon et mes notes, est en fait l'équivalent d'un tenancier de bordel, tandis que le personnage d'Anthisthènes va être désigné par un autre terme qui correspond en gros à notre terme de proxénète. Donc je m'amuse assez, à essayer de déterminer qui signifie quoi.


Pour ce qui est de l'Apologie de Socrate, il faut savoir qu'après sa mort, Socrate est vite devenu une figure littéraire et que Platon n'a pas été le seul à écrire des dialogues socratiques, et la question du procès de Socrate a également été pas mal abordée. Ainsi Platon a écrit une apologie, et Xénophon également.


Dans la version de Xénophon, l'accent est mis sur le fait que Socrate voulait mourir :


6 "Mais maintenant, si j'avance encore en âge, je sais que nécessairement j'aurai à subir les inconvénients de la vieillesse, que ma vue baissera, que j'entendrai moins bien, que j'aurai plus de peine à apprendre et plus de facilité à oublier ce que j'ai appris. Or, si j'ai conscience de cette déchéance et que je sois mécontent de moi-même, comment ma vie, poursuivit Socrate, pourrait-elle m'être encore agréable ?"


Socrate apparaît comme quelqu'un de très fier dans cette version de son procès, mais par rapport à Platon, on perd tout le développement sur la technique de Socrate et sa quête d'un homme plus sage que lui, ce qui est mon passage favori de l'apologie écrite par Platon. L'intérêt de la version de Xénophon est seulement dans cette explicitation du fait que Socrate voulait mourir.


Donc maintenant, je n'ai plus qu'à me coltiner les mémorables et l'Economique en version anglaise, puisque c'est dans l'édition Loeb qui a le mérite de contenir aussi dans le même volume le Banquet et l'Apologie de Socrate, que je les ai... les mémorables n'étant pas si aisé que ça à obtenir en bilingue français.


En tous cas, cette lecture correspond à la lettre X de mon challenge ABC.

 

challenge-Abc-2010.jpg

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22 avril 2010 4 22 /04 /avril /2010 11:32

seigneursOlympe.jpgAujourd'hui nous allons parler de Seigneurs de L'Olympe de Javier Negrete, dans le cadre du défi Mythes et légendes.


Vint l'heure de donner naissance à Zeus, son sixième enfant, et Rhéa supplia sa mère de l'aider à accoucher en secret. Lorsque Zeus naquit, Gaia l'emmena en Crète, où elle abrita dans une grotte impénétrable sous les flancs boisés du mont Ida. Entre-temps, Rhéa prit une pierre que Gaia avait secrétée en son sein, la recouvrit d'une laine imprégnée d'huile, l'emmaillota et la présenta à Cronos. L'infortuné souverain n'en fit qu'une bouchée, croyant qu'il s'agissait de Zeus.

Quand Zeus vint à grandir...

Le temps a passé, Zeus a vaincu Cronos et est devenu le nouveau souverain de l'Olympe, mais une menace à son règne se profile...un complot se trâme dans l'Olympe même, tandis que Typhon, à la tête d'une armée de Géants, s'avance à la conquête de l'Olympe. Le monde lui-même est troublé, les centaures, les créatures marines et forestières se plaignent des hommes et veulent anéantir cette race. Zeus parviendra-t-il à déjouer le plan visant à mettre une nouvelle génération sur le trône ? et réussira-t-il à préserver les hommmes ?


Ce livre est une vraie merveille, on sent la maîtrise réélle du sujet par l'auteur, ses descriptions témoignent d'une véritable connaissance des mythes grecs et du langage épique, car Negrete arrive intégrer à son récit des expressions homériques sans pour autant que cela semble lourd ou forcé, on trouve même certains épithètes homériques, comme potnia Héra ou Athéna poliade. Certaines ordres sont également en grec translittéré.

Negrete parvient également  à intégrer différents épisodes et références mythologiques à son récit de façon parfaitement naturelle.  Ici, le récit, c'est celui de la Gigantomachie. A travers ce récit, on croisera Prométhée, Atlas, Médée, Ganymède... mais surtout on suivra les dieux. Negrete a réussi à donner à chacun une personnalité propre, j'aime énormément la manière dont il arrive à rendre les dieux vivants. J'ai particulièrement aimé le personnage d'Athéna et j'ai partagé dans l'épilogue les sentiments de Zeus et Héphaïstos.


Negrete ne se contente pas de réécrire la gigantomachie, il ajoute également une touche personnelle aux mythes, avec par exemple, le fait que le pouvoir de Zeus de lancer des éclairs vient d'une invention des cyclopes. On sent que ce livre est le résultat d'une véritable réflexion et ainsi j'ai particulièrement aimé cette remarque sur Aphrodite et Zeus :


"Elle avait la peau dorée, un corps voluptueux qui semait la folie chez les hommes et les dieux. Hormis chez  Zeus, qui ne l'avait pas touchée, curieusement. C'était là un mystère. A eux deux, ils avaient forniqué avec l'Olympe au grand complet et la moitié des mortels, cependant ils gardaient leurs distances l'un envers l'autre."


A la fin du livre, on trouve en appendice un essai sur Mythologie et fantasy dans Seigneurs de l'Olympe, où l'auteur explique chapitre par chapitre ses sources d'inspirations et certaines de ses inventions. C'est une chose qui donne envie de se plonger dans la bibliothèque d'Apollodore, et de découvrir aussi la part d'influence issue des mythes scandinaves. C'est un essai intéressant qui permet de resituer les différents mythes mentionnés dans l'histoire.


Ce roman est une véritable perle pour les hellénistes, tant il est truffé de références, mais peut aussi se lire sans connaissance développée de la mythologie grecque, d'autant qu'il y a à la fin une liste des personnages avec quelques indications à leur sujet.

 

mythesetlegendes

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6 janvier 2010 3 06 /01 /janvier /2010 19:22
alceste
Aujourd'hui, nous allons parler de théâtre et plus exactement de l'Alceste d'Euripide traduit par Louis Méridier, car j'ai un faible pour le théâtre grec et plus j'avais un point à vérifier dedans pour mon mémoire. C'est une pièce qui m'avait marquée pour la beauté de certains vers que j'avais eu un jour à traduire en version(je pense, Neph, que ceci te dit quelque chose, non ?) :

"Ah ! si la voix mélodieuse d'Orphée m'était donnée pour enchanter de mes accents la fille de Déméter ou son époux, et l'enlever à l'Hadès, j'y descendrais ; ni le chien de Pluton, ni le rameur Charon, conducteur des âmes, ne m'arrêteraient avant d'avoir au jour ramené ta vie."

L'histoire, la voici : Admète est destiné à mourir prématurément mais Apollon est parvenu à obtenir pour lui d'échapper à ce destin s'il trouve quelqu'un qui accepterait de mourir à sa place. Admète essaye donc de trouver quelqu'un pour se sacrifier à sa place, tout le monde refuse, y compris ses parents fort âgés, la seule exception est sa femme Alceste qui accepte de se sacrifier pour lui, par amour et pour ses enfants car Admète sera plus à même de veiller sur eux et d'assurer leur avenir qu'elle.
 La pièce se déroule le jour où Alceste doit mourir.
La première partie de la pièce montre l'attente de l'événement  fatal, avec le choeur à l'extérieur du Palais qui se demande si elle a déjà rendu ou non son dernier soupir.
Dans la deuxième partie, Alceste vient de mourir, Admète est accablé par le deuil et c'est à ce moment que survient Héraclès, qui est en train d'accomplir ses douze travaux et vient demander l'hospitalité d'Admète. Admète lui fait croire que la maison est en train de porter le deuil d'une étrangère pour qu'Héraclès n'aille pas chercher l'hospitalité ailleurs, car en dépit de son malheur, Admète tient à respecter les règles de l'hospitalité. Du coup, Héraclès festoie joyeusement dans l'aile des domestiques pendant que le reste de la maison est accablé par le deuil de sa maîtresse. A la fin de son festin,  Héraclès se rend compte que quelque chose cloche et la servante finit par lui expliquer la situation. Héraclès décide alors de ramener Alceste du royaume d'Hadès afin de remercier son hôte de son respect pour les lois de l'hospitalité et c'est ainsi qu'Alceste et Admète furent à nouveau  réuni.

alceste-2.jpg

J'aime beaucoup toute l'attente qui empreigne le début, ça me rappelle un peu l'ambiance des pièces d'Eschyle, mais on sent énormément l'influence de la formation oratoire qu'a reçu Euripide, parce qu'il y a des passages qui sont nettement marqués par des échanges d'argument,  celui qui m'a marqué étant l'échange entre Admète et son père, qu'il renie parce que celui-ci a refusé de se sacrifier pour lui, alors que du point de vue d'Admète, son père aurait dû le faire, parce qu'il est déjà au terme de la vie, mais son père lui, essaie de lui démontrer qu'il n'a aucun droit de lui demander de sacrifier sa vie pour lui, car sa vie n'a pas moins de valeur que la sienne et il a tout autant le droit que lui, de vivre. J'aime beaucoup cette question : est-ce le père ou le fils qui a raison ? Je suspecte Admète d'avoir espéré jusqu'au bout que ses parents changeraient d'avis et prendraient la place d'Alceste.

Phérès : "En quoi donc t'ai-je fait tord ? De quoi te dépouillé-je ? Ne meurs pas plus pour ma personne que je ne fais pour la tienne. Tu as plaisir à voir le jour : et ton père, crois-tu qu'il en ait de la peine ? Ma foi, oui, je me dis qu'il est long, le temps à passer sous la terre, et que si la vie est courte, elle a pourtant sa douceur."


Cet échange introduit aussi la question de la lâcheté d'Admète, car sont-ce réellement ses parents qui sont lâches parce qu'ils n'ont pas offert de mourir pour lui permettre de vieillir aux côtés de sa femme ou Admète qui a accepté que quelqu'un meurt à sa place ? C'est une question que je me suis d'ailleurs posée en lisant la pièce : pourquoi la vie d'Admète mérite plus d'être prolongée ? Il n'y a aucun motif politique à cela, Alceste se sacrifie de façon désintéressée et c'est ce qui fait d'elle un modèle de la vertu féminine puisque c'est l'épouse dévouée au point de mourir pour préserver la vie de son époux et qui meurt très dignement, elle prend d'ailleurs la chose beaucoup mieux qu'Admète. Cette mort exemplaire fait qu'Alceste est mentionnée dans le Banquet de Platon, à l'occasion du discours de Phèdre, face à Orphée, comme l'exemple du noble sacrifice tandis qu'Orphée échoue parce que c'est un lâche qui n'a pas le courage de se tuer pour rejoindre la femme qu'il aime.
Un autre passage que j'ai trouvé intéressant c'est la discussion entre Apollon et la Mort(traduit Trépas dans mon texte mais je préfère la mort, certaines d'entre vous doivent se douter du pourquoi) au début de la pièce, qui s'inscrit dans les querelles entre dieux quant à leur prérogatives avec les Anciens dieux qui cherchent à maintenir les leurs face aux nouveaux. J'aime le côté juste de la Mort, parce que dans cette affaire, c'est Apollon qui a brisé les règles en essayant à empêcher la mort d'Admète :

Apollon. - Ne se peut-il qu'Alceste arrive à la vieillesse ?
Le Trépas. - Non. J'aime les honneurs, moi aussi, crois-le bien.
Apollon. - Tu ne prendras pourtant rien de plus qu'une vie.
Le Trépas. - La mort des jeunes me vaut une part plus belle.
Apollon. - Mourant vieille, elle aura de riches funérailles.
Le Trépas. - Ce sont les possédants que ta loi favorise.
Apollon. - Qu'est-ce à dire ? Aurais-tu de l'esprit, sans qu'on sache ?
Le Trépas. - Ceux qui peuvent achèteraient de mourir vieux.
Apollon. - Ainsi, tu ne veux pas m'accorder cette grâce ?
Le Trépas. - Non certes ; tu connais d'ailleurs mon caractère.
Apollon. - Oui : haï des mortels et en horreur aux dieux !
Le Trépas. - Tu ne saurais avoir toujours plus que ton dû.

C'est une pièce que j'aime beaucoup pour la manière dont elle dépeint le chagrin des personnges et pour les réflexions qu'elle suscite.

Il s'agit là de ma lecture pour la lettre E du challenge ABC.


challenge-Abc-2010.jpg
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21 décembre 2009 1 21 /12 /décembre /2009 18:00
Phedre.gifMa lecture de the jane Austen's guide to dating a mené Neph à me proposer de faire une sorte de lecture commune sur le thème de la drague, donc aujourd'hui Neph va vous parler de l'Art d'Aimer d'Ovide et moi, du Phèdre de Platon, puisque le Phèdre est un des deux ouvrages sur lequel je travaille dans le cadre de mon mémoire sur l'homosexualité grecque.

Pour vous le présenter brièvement, le Phèdre est un dialogue de Platon mettant en scène Socrate et Phèdre au bord le l'Illyssus, les cigales chantent, il fait une chaleur étouffante et donc tous deux s'installent dans l'herbe pour parler d'amour, ou plus exactement tout commence avec Phèdre qui revient d'une conférence de Lysias avec entre les mains le discours de Lysias où celui-ci démontre - dans la tradition des éloges paradoxaux à la mode à l'époque dans les écoles de rhétorique - qu'il vaut mieux accorder ses faveurs à qui n'aime pas plutôt qu'à qui aime. Phèdre lit ce discours à Socrate, puis Socrate, n'appréciant pas la manière dont la démonstration est faite, se retrouve à faire un discours sur le même sujet. Ensuite, Socrate va faire un nouveau discours destiné à racheter le précédent car il pense avoir commis un acte impie contre le Dieu Eros et il va faire l'éloge du transport amoureux, ce qui va être l'occasion d'un des mythes platoniciens, celui de la procession divine et de l'âme comme un attelage aîlé. Ce sera l'occasion de développer une théorie de l'amour qui sera ce que nous appelons l'amour Platonicien, c'est-à-dire le fait qu'il convient de ne pas céder au désir charnel, car le véritable amour ne passe pas par la satisfaction d'appétit sexuel mais par le fait de vivre ensemble et de chercher ensemble à atteindre la sagesse.

La dernière partie du dialogue est une discussion, non sur l'amour mais sur la rhétorique, les discours précédents étant considérés comme des exemples de rhétorique et le tout s'inscrit dans une réflexion sur le lien qui devrait exister entre rhétorique et vérité.

lapin offrande amoureuseJe ne vais pas vous parler des théories de Platon, ni des aspects philosophiques de ce texte, ou des problèmes critiques mais de ce que les trois discours nous apprennent des relations amoureuses à Athènes au IVème siècle avant notre ère.
Tout d'abord le sujet du discours de Lysias est : faut-il accorder ses faveurs à celui qui n'aime pas plutôt qu'à celui qui aime ? la personne qui accorde ses faveurs est un adolescent ou un jeune homme, puisque chez les grecs, les relations étaient essentiellement entre un jeune homme, qui occupait un rôle passif, et un homme plus âgé, qui est le partenaire actif dans la relation. Il faut savoir que seul le partenaire actif est considéré comme éprouvant du plaisir dans la relation, ce qui fait que la séduction du jeune homme implique de lui proposer des avantages, ainsi à la fin du Banquet, Alcibiade explique comment il a décidé d'offrir ses faveurs à Socrate - qui ne les a pas accepté - dans le but de profiter de l'enseignement de Socrate. Dans le Phèdre, ce qui est proposé au jeune homme, c'est une sorte d'allié, qui sera là pour le soutenir dans l'adversité. La relation est fondé davantage sur un échange de services que sur de l'affection. Ce qui initialement suscite la relation, c'est la beauté du jeune homme. L'idée d'aimer quelqu'un qui n'a aucune beauté est impensable chez Platon. 
Il faut noter aussi que le sujet du discours de Lysias aurait été complètement immoral si cela avait été une femme et non un jeune homme qui devait décider de la personne à qui offrir ses faveurs. Les femmes de la bonne société athénienne ne choisissait pas leurs époux, le mariage n'était pas fondé sur l'amour mais sur des intérêts financiers et ces femmes n'étaient pas sensée sortir de chez elles et être vue par des hommes extérieurs à la famille, en plus de cela, l'adultère était sévèremment punis, le mari pouvant tuer l'amant s'il surprenait celui-ci en flagrant délis, donc du côté des femmes libres de bonne famille, les possibilités de séduction étaient très limitées et dangereuses.

pederastie-grecqueLes deux premiers discours du Phèdre nous peignent un portrait très négatif de l'amant, c'est l'homme qui n'honore pas ses promesses, qui s'en va dès qu'il a obtenu ce qu'il voulait, qui se vante de ses conquêtes, cherche à rendre l'aimé dépendant. De cette argumentation ainsi que de celle du troisième discours, nous pouvons souligner un trait qui rejoint le grand soucis de theJane Austen's guide to Dating : comment trouver un partenaire durable et pas juste intéressé par le sexe ?
Il y a même une série de constat sur des points sur lesquels on ne peut fonder une relation stable, ainsi, on a l'importance qu'il faut accorder au caractère de l'être aimé, afin de savoir si quand l'attraction due au physique sera passé, il sera possible d'établir une relation d'amitié, le fait que le bon compagnon c'est celui qui va aider l'être aimé à s'améliorer à s'épanouir alors que celui qui n'est intéressé que par son désir ne cherche qu'à encourager l'autre à prendre une forme qui lui plaît, donc à cultiver les traits physiques qui lui plaisent au lieu de chercher le mieux pour son aimé, et il vaut mieux quelqu'un qui va corriger l'aimé plutôt que le flatter sans cesse.

On retrouve derrière les arguments donnés dans les différents discours, des préoccupations qui sont toujours d'actualité et la recherche d'un compagnon durable est présente même chez Platon.



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29 juin 2009 1 29 /06 /juin /2009 12:44
Mon sujet de mémoire ayant été approuvé mercredi dernier, je me suis empressée d'aller chez Gibert pour trouver des livres qui me permettraie'éclairer la question de la sexualité chez platon. J'ai donc mis la main sur ce livre de Kenneth J. Dover : Homosexualité grecque, publié aux éditions La pensée sauvage.

J'ai d'abord été étonnée par ce livre, car je m'attendais plus à une approche à Jean Pierre Vernant, avec un langage très chatié et où l'on aurait traité de l'homosexualité sans faire la moindre référence aux pratiques sexuelles et en fait, Kenneth J. Dover n'hésite pas à appeler un chat un chat et à se pencher sur l'étude des représentations érotiques(le livre en contient d'ailleurs un certain nombre dans les illustrations), des graffitis ou des questions d'homosexualité passive et active.

Ce livre est donc tout à fait passionnant, Dover essaye de rester neutre, c'est-à-dire de ne pas faire un ouvrage partisan où l'on se sert de l'étude des grecs pour démontrer ses propres positions sur l'homosexualité, son but est d'éclairer les comportements de l'époque sans juger mais en même temps ses opinions ne sont pas toujours dissimulées et il n'hésite pas à dire clairement son opinion propre, comme par exemple, lorsqu'il aborde la question de savoir si Socrate a couché ou non avec Alcibiade et qu'il s'attauqe à certains partisans du fait qu'il ait couché avec, sur le fait que ce n'est pas là l'important, point avec lequel je suis en parfait accord, la question ne présente d'intérêt que parce qu'elle nous permettrait d'avoir une idée plus nette de la véracité des témoignagnes laissés par Platon et Xenophon, et dans mon cas permettrait de savoir à quel point Platon a idéalisé Socrate.

Dover part de l'analyse du procès qu'Eschine a intenté à Timarque pour prostitution pour explorer les rapports que les Athéniens entretrenaient avec l'homosexualité. Dans ce livre, on a le droit à une réflexion sur la distinction entre prostitution et relation amoureuse, la différence entre ce qu'un citoyen et un étranger était en droit de faire dans ce cas-là, on découvre comment un erastes(amoureux ou le dominant) faisait sa cour à l'eromenos(le jeune homme dont on cherchait les faveurs), la différence qui pouvait exister dans ses pratiques entre les différentes classes de la société, et les différentes raisons qui menaient à poursuivre des conquêtes masculines. L'homosexualité féminine est abordée brièvement car les données sur le sujet sont peu nombreuses, ce qui mène l'auteur à penser qu'il devait y avoir un tabou sur la question.

J'ai aussi appris pas mal sur la question des représentations sur les vases en céramique et je commence à maîtriser les détails à connotation sexuelle chez Platon, ce qui est un grand progrès dans la mesure où j'ai une grande capacité de cécité sur la question depuis que j'ai pris Théétète pour le mignon de Théodore dans une version grecque.

Comme ce livre m'a plu, j'ai commandé Greek Popular Moral du même auteur, dans l'espoir de pouvoir le lire à la plage.
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Citations : Terry Pratchett

Interesting time, p.43
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Interesting Time p.19
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Le Huitième Sortilège p.87
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La huitième Couleur p.91
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Apes had it worked out. No ape would philosophize, "The mountains is, and is not." They would think, 'The banana is. I will eat the banana. There is no banana. I want another banana."
Unseen Academicals p.76
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'I would like permission to fetch a note from my mother, sir.'
Ridcully sighed. 'Rincewind, you once informed me, to my everlasting puzzlement, that you never knew your mother because she ran away before you were born. Distincly remember writing it down in my diary. Would you like another try ?'
'Permission to go and find my mother ?'
Unseen Academicals,  p.187
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'The knees should be covered. It is a well-known fact that a glimpse of the male knee can drive women into a frenzy of libidinousness.'
Unseen Academiacls, p.130
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"Lord Vetinari's rules : if it takes an Igor to bring you back, you were dead. Briefly dead, it's true, which is why the murderer will be briefly hanged. A quarter of a second usually does it."
Unseen Academicals, p. 98
*****
"I'm a wizard ! We can see things that are really there, you know,"said Ridcully. " And in the case of the Bursar, things that aren't there too."
Hogfather, p 98

Perdu Dans La Vallée ?

Malakos is here too !!!

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Le mot de l'auteur

 

Bienvenue au sein de la vallée des grenouilles séchées,  blog d'une prof de lettres classiques fan de Star Trek et de Terry Pratchett.
Vous trouverez ici mes impressions sur des ouvrages que j'ai lu, des films qui ont retenu mon attention et parfois des séries.
 
Sur ce, je vous souhaite une bonne navigation mais méfiez-vous d'une chose, j'ai une tendance à m'adresser plus à ceux qui ont lu ou vu ce dont je parle, donc quand ce n'est pas votre cas, évitez de continuer votre lecture quand vous atteignez le paragraphe commençant par "dans le détail" ou voici la partie spoiler mais dans la plupart des cas, les spoilers sont en surlignés.

The Bursar

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De mon côté, je vais faire le challenge Valar !

 

Jusqu'ici j'ai peu avancé.

J'ai lu :

The Hobbit

Le Silmarillion

The Fellowship of the Ring

The Two Towers

 

L'adieu au Roi, chansons pour J.R.R. Tolkien

Beowulf

 

 

Challengevalar 2

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