Aujourd'hui je vais vous parler d'un livre qu'on m'a prêté : Les aventures miraculeuses de Pomponius Flatus d'Eduardo Mendoza.
Sous l'empereur Auguste, Pomponius Flatus est un philosophe naturaliste qui parcourt l'empire à la recherche d'eaux miraculeuses sensées procurer la sagesse. Malheureusement tout ce que son enquête lui a procuré jusque-là est une terrible diarrhée et de tonitruantes flatulences...
Après quelques péripéties, il arrive dans la petite ville de Nazareth, où Jospeh, le seul charpentier, vient d'être condamné à la crucifixion pour meurtre et son exécution retardée par le fait qu'il faut d'abord lui laisser le temps de confectionner sa propre croix. Pomponius s'intéresse assez peu à cette affaire mais il a besoin d'argent et le petit Jésus lui en promet si celui-ci accepte de l'aider à innocenter son père. C'est ainsi que Pomponius se retrouve à enquêter sur le meurtre du riche Epulon tout en expliquant sa philosophie du monde au petit Jésus.
J'ai été vraiment séduite par ce livre qui propose une enquête intéressante et assez drôle, tant parce qu'on y croise toutes sortes de personnages amenés à un grand avenir biblique comme Judas ou Lazare mais qui à ce moment-là ne sont que de purs anonymes, que par le héros, philosophe miteux, harcelé par de terribles troubles intestinaux parce qu'il ne cesse de boire n'importe quelles eaux.
Le style est très gai et montre une très bonne maîtrise des références antiques dont l'auteur joue à merveille. Certains personnages s'expriment de façon biblique, tandis que les romains et les grecs utilisent des images épiques en particulier dès qu'il est question de l'Aurore. On trouve aussi toutes sortes de références et clins d'oeil littéraires. L'auteur joue habilement des préjugés antiques et parodie avec brio le style des auteurs naturalistes.
C'est une lecture très plaisante avec un style qui vaut le détour. Je vous laisse sur quelques citations savoureuses :
"En raison de quoi les Juifs sont toujours en train de se repentir de ce qu'ils ont fait ou de ce qu'ils vont faire, sans que cette attitude les rende moins irréfléchis au moment d'agir, ni plus honnêtes, ni moins contradictoires que le reste des mortels. Ils sont seulement, comparés à d'autres peuples, plus modérés dans leurs moeurs. Ils refusent beaucoup d'aliments, réprouvent l'abus du vin et des substances toxiques, et, si étrange que cela paraisse, sont peu enclins à l'amour socratique, même entre amis."
"Jésus me demande ce que c'est qu'une pute et je le lui explique de façon sommaire, car je n'ai jamais cru qu'il convenait de cacher aux enfants des connaissances qu'ils finiront toujours par obtenir de la bouche des esclaves, des marchands, de la soldatesque et autres gens grossiers, ou par leur propre expérience, auquel cas mieux vaut qu'ils soient au courant des tarifs en vigueur."
"Je compris que notre fin était arrivée et tentai de me couvrir le visage avec un pan de ma toge pour mourir avec la dignité d'un citoyen romain de première classe, mais je n'y parvins pas, car j'avais les mains attachées dans le dos."