
Mais peut-être faudrait-il un peu parler de l'histoire ? L'histoire est assez simple, Catherine est une jeune fille qui passe son temps dans les romans gothiques, qui est très naïve et innocente, et qui part avec les Allen passer quelques semaines à Bath, une ville thermale où elle fait vite la connaissance d'Isabella, puis des Tilneys, donc comme toujours l'histoire va tourner autour des couples qui se font et se défont et sur le parcours initiatique de l'héroïne qui va devenir un peu moins innocente et crédule qu'au début.
Catherine est sympathique mais ici l'intérêt du livre n'est pas vraiment dans le fait de savoir si elle va trouver l'amour mais plutôt dans l'humour du récit, qui est clairement une satire des romans gothiques et par endroit une défense du roman. C'est pour ça aussi que je pense à Stendhal, parce que dans les deux cas on a cette distance par rapport au héros ou à l'héroïne qui est introduite par les remarques du narrateur, remarques pleines d'ironie. Le style fait aussi un peu penser à Scarron dans le roman comique ou à Jacques le Fataliste et son maître de Diderot, dans les moments où Jane Austen compare ce qu'elle aurait pu écrire et ce qui est la réalité de l'histoire.
Mais bon voici quelques extraits car tout ce que je pourrai en dire ne vaudra jamais le texte même :
Dans le cadre de la présentation de l'héroïne :
"But from fifteen to seventeen she was in training for a heroine ; she read all such works as heroines must read to supply their memoiries with those quotations which are so serviceable and so soothing in the vicissitudes of their eventful lives."
Petites descriptions des moeurs étrangères selon l'héroïne :
"Charming as were all Mrs. Radcliffe's works, and charming even as were the works of all their imitators, it was not in them perhaps that human nature, at least in the midland counties of England, was to be looked for. Of the Alps and Pyrenees, with their pines forests and their vices, they might give a faithful delineation ; Italy, Switzerland, and the South of France, might be as fruitful in horrors as they were represented. Catherine dared not doubt beyond her own country, and even of that, if hard pressed, would have yielded the nothern and western extremities."
Je trouve que le résumé de l'édition Penguin en dit trop sur l'histoire car il fait référence à quelque chose qui arrive vers les pages 150(pour un livre qui en fait 236...)ce qui fait qu'on perd un peu le suspens, car on devine déjà quel sens va avoir cette aventure. Sinon, je suis passée au nouveau penguin, c'est-à-dire les penguins vert et blanc entièrement en papier recyclable, mais bon ça n'a pas tout à fait le même charme que les anciens, j'avais un faible pour les couvertures avec illustration.
Sinon, nous voici arrivé dans la partie plus ou moins spoiler du billet, Catherine est une héroïne sympathique mais je ne rêverai pas d'être Catherine Morland(et non je ne me moquerai pas des personnes qui ont obtenu Catherine Morland au test facebook What jane Austen's character are you ?), Catherine est différente des grandes héroïnes Austénienne comme Elinor, Emma, Elizabeth, etc. car elle est naïve, innocente au point de ne rien connaître à l'art de faire la cour, de ne pas savoir lire les sous-entendus ou les raisons des actes de certains personnages, par rapport aux autres héroïnes elle n'a pas très brillante, elle serait plus proche du personnage d'Harriet Smith dans Emma, le caractère romanesque en plus mais ses déboires sont assez drôles, car elle est pleine de fraîcheur, par exemple quand elle ne comprend pas les raisons du comportement du capitaine TIlney ou d'Isabella. Elle se laisse facilement manipuler. C'est une héroïne de caractère médiocre, qui vit une histoire d'amour médiocre, l'opposé étant Marianne dans Sense & Sensibility qui serait plus une vraie héroïne, de celles qu'aimerait être Catherine, avec une histoire d'amour très romanesque avec sauvetage(bon d'accord c'est pas un sauvetage grandiose mais c'est un sauvetage à l'échelle du quotidien) mais c'est parce que Austen cherche à créer un décallage entre son héroïnes et les héroïnes gothiques, je dirai d'après une remarque qui est faite dans le livre(car je n'ai pas encore lu de critique donc je ne peux que spéculer avec ce que j'ai à ma disposition) que Jane Austen cherche à introduire avec ses romans des personnages et des histoires plus en accord avec la vie anglaise de la fin du 18ème siècle, c'est-à-dire quelque chose de plus réaliste.
Catherine a un petit côté reflet du lecteur, car bon, nous ne nous attendons pas à découvrir un squelette dans une vieille abbaye, mais on aimerait toute quand même se retrouver à la place d'Amanda Price et obtenir Mr Darcy(moi je serai peut-être partie avec Bingley, parce qu'il fait moins niais que dans la version BBC) ou Whickam ou un des autres personnages Austénien, non ? Qui n'a jamais projeté Jane Austen sur la réalité, histoire de juger de la gent masculine ? On a là cette difficulté qu'il y a à s'arracher à la fiction pour embrasser une réalité beaucoup plus terne.
Sinon, ma question pour celle qui ont lu Northanger Abbey, pensez-vous qu'Isabella n'a jamais été sincère envers Catherine ou qu'il y a eu un peu de vérité dans cette amitié au début ?